La Radio Numérique, c’est
d’abord et avant tout un changement de technologie. Pourquoi abandonner les
bandes FM et AM qui offrent déjà une très bonne qualité de service ? Est-ce un
pas de plus vers la numérisation complète de la société ?
1)La radio : seul média français à ne pas avoir franchi le pas.
Depuis la fin
du XXème siècle et l’avènement de l’ordinateur, mois après mois, année après
année, le monde des médias avance à pas rapides sur le chemin de la
numérisation. Tout a commencé avec la télévision et les premières chaînes du
câble et du satellite (plusieurs centaines aujourd’hui), puis ce fût au tour
d’Internet et des informations disponibles en temps réel sur les sites des
grands quotidiens ou sur des portails dédiés (Yahoo, Google…). En 2005, deuxième
étape de modernisation de la télé, la TNT : télévision numérique terrestre. S’en
est suivi le succès des téléphones multimédias équipés de connexion Internet et
qui, pour certains, captent aussi la télévision. Et la radio dans tout ça ?
Il y a bien les webradios.
Nées au début des années 2000, elles se comptent par dizaines, et offrent un
panel de programmes très diversifiés. Il s’agit pour la plupart de flux
musicaux, agrémentés d’émissions. Des stations souvent associatives (les
webradios commerciales sont apparues très récemment et envisagent souvent un
développement sur le numérique) et qui pour la plupart ont aujourd’hui de
graves problèmes financiers.
Les fermetures
de webradios où les fusions d’associations sont fréquentes (Radio 13, par
exemple, à rejoint l’an dernier le groupe Mixx Radio pour devenir Mixx Radio
Gold). Il faut affronter les sociétés de droits d’auteurs (SACEM) qui réclament
plusieurs milliers d’euros par an. Des sommes astronomiques pour des radios qui
ne profitent d’aucune aide publique et ne survivent que grâce aux cotisations et
dons de leurs membres ou auditeurs. Certaines ont eu la chance de percevoir
quelques rentrées publicitaires. Quelques centaines d’euros qui donnent un peu
d’air, rien de plus. Une décennie après son apparition, le monde de la webradio
est déjà en danger. Pourtant, le système fonctionne plutôt bien à l’étranger
comme en Allemagne ou aux Etats-Unis, où les audiences sont bien meilleures.
La radio sur
Internet, c’est aussi le Podcast. Ce système permet aux internautes de réécouter
leurs émissions favorites à n’importe quel moment et n’importe où. Par exemple,
un aficionado des Grosses Têtes de RTL en déplacement à Los Angeles ne peut pas
suivre son programme à l’heure de diffusion avec le décalage horaire (8h/10h
pour 16h/18h en France). A son retour à l’hôtel le soir, il lui suffira de se
connecter sur le site de la station et de cliquer sur un lien pour ne rien rater
des meilleurs jeux de mots de Philippe Bouvard.
Le Podcast, toutes les
radios s’y sont mises. Les antennes généralistes comme les musicales (elles
proposent de réécouter le meilleur des matinales par exemple). Il y a même
des émissions faîtes exclusivement pour le Podcast ; à son départ de Fun
Radio, l’animateur Max en a réalisé quelques unes. Un programme sans musique
avec une petite bande de chroniqueurs. L’aventure n’a duré que quelques
mois.
Les radios se
félicitent des chiffres du Podcast (plus d’un million de téléchargements par
mois pour RTL), des chiffres à interpréter. Le Podcast fonctionne comme un
abonnement. L’utilisateur le télécharge spontanément une première fois. Par la
suite, à chaque mise à jour, la nouvelle émission se charge automatiquement sur
son ordinateur, même si l’internaute ne l’écoute pas. Jusqu’à ce qu’il mette fin
à son abonnement, de nouveaux fichiers viendront régulièrement s’ajouter à son
disque dur… et aux comptes de la radio qui produit l’émission.
Webradio et
Podcast sont deux modèles de radio numérique existants mais leur audience reste
marginale : selon Médiamétrie, 1 million de françaisdéclarent avoir
écouté au moins une fois une webradio. Sur les 13 millions de foyers
français connectés au web, ça ne fait pas beaucoup.
La question est
posée : l’arrivée de la radio numérique dans les voitures, les chambres et les
cuisines ne risque-t-elle pas de subir les mêmes déconvenues ? Pour trouver un
début de réponse, il faut aller à l’étranger, là où la radio numérique est une
réalité depuis plusieurs années. C’est le cas en Corée, aux Etats-Unis, en
Allemagne ou au Royaume-Uni. Selon une étude réalisée en 2007 chez nos voisins
anglais, le marché du numérique représentait 10% de la consommation radio de
Grande Bretagne, pour un total de 100 millions d’heures d’écoute par semaine.
Le quart des foyers anglais étaient équipés d’un poste de réception de radio
numérique (6 millions d’exemplaires vendus dans le pays). « La radio
numérique est une vraie source de dynamisme des marchés de l’audio traditionnel
explique-t-on chez Sony. Elle a permis de relancer le marché de la vente de
postes de radios qui était un peu en perte de vitesse ».
Comme
Rome ne s’est pas faite en un jour, le numérique a mis du temps à s’imposer
outre-manche. Les expérimentations ont débuté en 1994 mais les premiers
récepteurs à prix abordables ne sont arrivés dans le commerce qu’en 2002 (30 000
exemplaires au prix fort - près de 500€ - avaient tout de même déjà été vendus).
Pour promouvoir la nouveauté, une vaste campagne de publicité a été engagée
par un groupement de radios (dont la BBC, cf. photo)) ce qui a fait
décoller le marché. Aujourd’hui, les britanniques ont le choix entre 250 radios
dont une douzaine de stations nationales et de nombreuses antennes locales et
régionales. Dans certaines villes, il peut y avoir jusqu’à 50 radios.
L’analogique n’a cependant pas disparu, et son enterrement n’est pas programmé
avant 2020… plus de 25 ans après l’apparition du numérique. En Allemagne,
premier pays à annoncer la disparition de l’analogique en 2001, la date fixée
est 2015 : 16 ans après l’apparition du numérique. Sachant que la France s’y met
tout juste, la bande FM a encore de beaux jours devant-elle.
Le gouvernement français est
pourtant décidé et le processus lancé. Les premières émissions en numérique
doivent débuter à lafin de cette année 2009, on parle du mois de
décembre. Le calendrier initial prévoyait un démarrage fin 2008-début 2009… déjà
(au moins) un an de retard ! Les appels à candidatures du CSA et les tests
techniques ont pris plus de temps que prévu.
Actuellement, les radios
utilisent principalement la bande FM (en modulation de fréquences), mais elles
ne sont pas seules. L’armée, l’aviation, les routiers font aussi partie des
clients. La bande FM est saturée, notamment dans les grandes métropoles (Paris,
Lyon, Marseille, Bordeaux, Lille…). Ejecter les radios de la FM libérerait de la
place et permettrait d’octroyer des fréquences aux télécom. La radio va
migrer vers la bande III, utilisée actuellement par CANAL +. Jeu de chaises
musicales : avec la TNT et le satellite, la chaine cryptée commencera à libérer
quelques unes de ces fréquences dès la fin 2009, et au plus tard fin 2012, avec
l'extinction de la télévision analogique hertzienne.