#6 - RMC 2000-2001 :
LA TRANSITION DE "MONTE-CARLO" A "INFO"
C’était
il y a maintenant 20 ans, le 22 janvier 2001. Un nouvel électrochoc était
lancé dans le paysage radio (et périphériques en tête) avec la mutation de RMC en radio « news & talk »,
suite au rachat de la radio par Alain Weill (venu du Groupe NRJ), et des années de péripéties qui
auront eu raison de la santé de la radio qui était alors encore monégasque.
Remontons quelques années en
arrière pour resituer : en 1998, la Sofirad (société contrôlée par l’Etat)
réussit à revendre RMC dont elle cherchait à se désengager depuis le milieu
des années 80, période à partir de laquelle Radio Monte-Carlo commençait à voir
son audience décliner. La radio est alors reprise par le groupe Pierre Fabre
(aussi propriétaire de Sud Radio), avec la très délicate mission de remonter ses
audiences. Car cette année-là, RMC était en très mauvais état avec des
audiences en chute libre (moins de 3% d’audience cumulée en mai-juin 1998).
La radio subit un vaste plan social, la grille est réduite au bas coût et
devient très musicale (avec néanmoins la mise en place à nouveau de quelques
émissions à partir de début 2000).
Le 5 juillet 2000, coup de
théâtre : NRJ Group, qui souhaite récupérer les 20% du groupe Fabre dans
Nostalgie pour en devenir l’unique propriétaire, les obtient dans une offre
incluant RMC, le groupe Fabre voulant se désengager de la station dont
l’audience tombait alors en dessous des 2% ! Jean-Paul Baudecroux y voyait
une opportunité d'obtenir enfin une radio généraliste. Avec Alain
Weill (alors directeur général de NRJ Group), ils planchent tout l’été sur un projet
de reformatage de RMCpour en faire une radio tout info à bas coût, en
misant sur l’interactivité avec les auditeurs. Le projet sera bloqué en
septembre, le CSA constatant qu’avec 5 radios, le groupe NRJ était en infraction
de la loi anti-concentration, avec un bassin de population trop important. Le 13 novembre 2000, NRJ choisit de renoncer à
RMC pour se conformer à la loi.Alain Weill, qui avait piloté
le projet, annonce ainsi son intention de quitter le groupe NRJ pour fonder sa propre
société, NextRadio, afin de pouvoir reprendre seul RMC, et devenir ainsi
enfin propriétaire de « sa » radio.
2001 sera donc l’année de la
mutation pour RMC, très inspirée par les radios américaines. Un consultant
américain lui trouve la formule « info, talk, sport », et la volonté de créer
une grille qui ne coûte que très peu pour rattraper les lourdes pertes de la
station. Il paraîtrait qu'avant son arrivée, Alain Weill, qui écoutait déjà
beaucoup RMC, aurait déclaré que ça lui faisait "penser à Radio France un jour
de grève".
Alain Weill recrute autour de lui « une équipe jeune qui connaît
bien la FM » selon ses dires : Jérôme Pourteau est nommé directeur général
adjoint, et Franck Lanoux dirige les programmes et la stratégie. Ils sont tous
deux en provenance de NRJ Group. Fabrice Lundy, ex-rédacteur en chef de RTL, est
nommé à la tête de la rédaction.
A l’antenne, fini les longs
journaux, remplacés par de courts flashs info toutes les heures, comme sur les
musicales. Sauf que la musique, elle, s’en va aussi ! A la place,
beaucoup de parole, et en majorité celles des auditeurs qui sont invités à
appeler pour s'exprimer en direct sur les sujets qui font l'actualité.
Le
nouveau RMC prend forme le lundi 22 janvier 2001. Parmi les nouvelles
recrues : Christian Spitz (l’ex-Doc de « Lovin’Fun » sur Fun Radio) anime
une libre-antenne médicale en fin de matinée, Bruno Dranesas (journaliste
économique passé par LCI) avec une émission économique (« La bourse
facile »), Valérie Expert parle consommation l’après-midi, suivi de
Sylvain Attal, sorti de France 2, aux commandes d’une libre-antenne sur
l’actualité au nom très évocateur : « RMC Controverse », et qui allait
préfigurer les années suivantes le concept des « Grandes gueules ».
Justement, Alain Marschall (ancien de RMC dans les années 80-90) était
sorti de RFI pour revenir à RMC et prendre les commandes de deux tranches infos.
Le soir, place au sport, avec Christophe Pacaud en semaine et Alexandre
Delpérier le week-end pour décrypter l’actualité sportive, avec des
interviews depuis les stades par téléphone mobile ! A noter que sur l'idée des
soirées 100% sport (et essentiellement football) en quotidienne, RMC n'était pas
la pionnière ; Europe 1 le faisait aussi depuis 1996. RTL suivra aussi un
an plus tard la "tendance" des soirées 100% foot.
Pour la matinale, la tranche
est confiée au journaliste Yvon Le Gall (suivi d'une émission interactive
sur l'actualité avec les auditeurs, "RMC Vous"), dans laquelle Alain Weill était
intervenue le premier jour pour annoncer le nouveau RMC, qui veut mettre aussi
en place des décrochages locaux dans les grandes villes, notamment pour l’info
trafic, l’information locale et la météo. (cela avait été mis en place à Paris,
Marseille, Nice, puis progressivement à Lyon, Rennes, Toulouse, Bordeaux, Tours
et Orléans)
AUDIO - Alain Weill au
micro de RMC pour annoncer la nouvelle formule dans la matinale (22/01/2001)
François Sorel en 2000
Cette première grille comprenait
encore quelques éléments maintenus (pour encore quelques mois, pour une grande
partie d’entre eux) : l’historique José Sacré aux petits matins,
Malher et sa libre-antenne « Salut les planqués » en soirée, le rendez-vous
politique du « Forum RMC » avec Le Point et Infonie le samedi à 18h, et « De
quoi j’me mail ? », l’émission informatique et nouvelles technologies de François Sorel,
qui était alors déjà en place depuis un an, et passe de la semaine au week-end.
Cette mutation se consolidera en
juin avec le changement de nom en « RMC Info » pour affirmer la volonté
d’Alain Weill d’en faire une radio nationale, quitte à sacrifier le passé
monégasque de la station. Toute la radio quittera d’ailleurs Monaco en
novembre 2001 pour s’installer dans un nouveau siège à Paris, le long du
périphérique. Une page est ainsi symboliquement tournée.
Cette nouvelle grille « de
transition » allait marquer ainsi le début d’une nouvelle ascension pour RMC,
qui en avait besoin après des années agitées. Son audience commence à remonter, la radio
communique dans la presse à coup de « publi-reportages » (extrait
d'image ci-dessous),
et commence à faire parler. A la rentrée 2001, RMC Info accueille
Jean-Jacques Bourdin parti de RTL. Une aubaine pour Alain Weill qui
souhaitait un « anchorman », une tête d’affiche qui incarnerait la matinale avec
une liberté de ton à l’image de ce qui existe aux Etats-Unis. RMC jouera aussi
l’audace en recrutant l’ancienne actrice X Brigitte Lahaie pour parler
sexualité l’après-midi.
Enfin, toujours la saison suivante, la station a
surpris tout le monde en réussissant à obtenir l’exclusivité française des
droits radio de la Coupe du Monde 2002, marquant là aussi un nouveau cap
avec l’arrivée par la suite de nombreux évènements sportifs retransmis en direct
à l'antenne, et de grands spécialistes du sport et d'anciens sportifs dans ce
qui formera la "Dream team". Les années qui suivront affirmeront le
développement de NextRadio outre RMC : rachat de la radio économique BFM en
2003, débuts dans la télévision en 2005 avec la création de la chaîne info BFM
TV, etc.
D'ailleurs, petite anecdote :
en 1995, alors que RMC était déjà en grandes difficultés, Libération évoquait
avec Jacques Abergel, le patron et co-fondateur de BFM, l'hypothèse de racheter
RMC ! Celui-ci répondait par la négative, et ajoutait par ailleurs qu'il
tenait à l'indépendance de sa jeune radio...
(source : Libération - 17/09/1995)
Preuve de cette réussite, la
grille de RMC (Info) n’aura connu que peu de bouleversements dans les années qui
ont suivi. Quitte à avoir laissé son histoire et son riche passé derrière
elle…
BONUS :
quand la nouvelle RMC Info faisait la promotion de sa diffusion sur
grandes ondes, en 2001...